Laza Lazarević – Au puits. Scènes de la vie serbe

Les éditions Ginkgo ont récemment publié un recueil de nouvelles, Au puits, de l’auteur serbe le plus ancien que j’ai pu lire jusqu’ici. C’est avec ce livre et cet auteur – une belle découverte – que je commence ma série sur les auteurs classiques d’Europe centrale, de l’Est et des Balkans à redécouvrir.

Laza Lazarević, né en 1851 à l’ouest de la Serbie et décédé prématurément à Belgrade en 1891, est l’auteur de neuf nouvelles dont cinq sont rassemblées dans le présent volume.

Ces cinq « scènes de la vie serbe » (pour citer le sous-titre du recueil) sont autant d’instantanés de la Serbie de son temps et surtout de la Serbie rurale dans les années précédant l’écriture de ces nouvelles (1879-1882). Ce sont aussi cinq textes d’une grande qualité d’écriture avec une grande souplesse dans le style, la construction et surtout la voix du narrateur. Lire la suite »


Du nouveau en « click/quer – and – collect/er »

Titre trompeur, car je n’ai pas beaucoup de nouveautés à signaler… Voici cependant quelques titres qui m’avaient échappé ces dernières semaines (cliquez sur les titres pour arriver sur le site des maisons d’édition).

Commençons par les couvertures les plus colorées ! Le nom de Dubravka Ugrešić m’est très familier : l’écrivaine, nouvelliste, essayiste et universitaire est l’une des grandes voix de Croatie, qu’elle quitte en 1993 avant de s’établir à Amsterdam. Plusieurs de ses textes sont disponibles en français depuis la traduction de L’offensive du roman-fleuve en 1993 (par Mireille Robin, pour Plon), mais Christian Bourgois a eu la bonne idée de ressortir début octobre deux textes en version poche, et promet d’autres titres l’année prochaine et l’année suivante. Ayant reçu des exemplaires de Le musée des redditions sans condition et de Le ministère de la douleur, vous pouvez vous attendre à un article sur au moins l’un d’entre eux, très bientôt ! Mais voici déjà quelques éléments de présentation :

« Tour à tour drôle, malicieux ou mélancolique, Le Musée des redditions sans condition retrace de façon lumineuse la vie de personnages partagés entre deux cultures », dit l’éditeur de cette « mosaïque de récits, d’anecdotes [et] de souvenirs », traduite par Mireille Robin. Une chronique à retrouver sur ce lien.

Quant à Le ministère de la douleur, traduit par Janine Matillon, quelques mots également de l’éditeur : « Dans ce roman où l’ironie et l’humour noir sont rois, Dubravka Ugrešić explore la douleur de la perte, l’isolement et la solitude auxquels ne saurait échapper aucun exilé. Que nous reste-t-il quand on a tout perdu – son pays, son foyer, et même sa langue ? »

Suivre le fil de la couleur m’amène à un texte très différent : Vert et florissant… d’un auteur reconnu en Slovaquie mais moins en France (plusieurs de ses œuvres sont pourtant disponibles en français) : Pavel Vilikovský (1941-2020). Le mieux est de lire l’alléchante présentation de l’éditeur, La Baconnière (collection dirigée par Ibolya Virág) dont voici seulement un extrait : « c’est sous les auspices du Faust de Goethe que Pavel Vilikovský a placé ce long mono­logue à l’ironie mordante dans lequel un narrateur sans nom, bavard et fantasque, évoque ses aventures dans le milieu de l’espionnage ». Traduction du slovaque par Peter Brabenec, parution le 6 novembre, et autre chronique à venir sur ce blog.

Arrivée ici, deux possibilités. La première est de suivre le fil de la géographie : Vert et florissant… promet de nous promener « en Suisse, en Rouma­nie, pass[ant] par le Liban et s’arrêt[ant] finalement dans une contrée reculée des Carpates – la Slovaquie”. Dans sa pièce Occident-Express, le dramaturge franco-roumain Matei Vișniec nous propose « un voyage initiatique dans les Balkans » doublé d’une « réflexion sur le difficile rapprochement entre les deux Europes séparées par un demi-siècle d’histoire mouvementée », dit l’éditeur Non Lieu de ce texte paru en juillet 2020.

L’autre possibilité est de partir du thème de l’espionnage pour sauter à celui du crime avec La bible perdue, thriller ésotérique d’Igor Bergler, écrivain roumain traduit ici par Laure Hinckel. « Interrompu par la police roumaine en pleine conférence, le célèbre professeur Charles Baker, de l’université de Princeton, croit d’abord à une méprise. Que peut-il avoir à faire avec les vicissitudes de Sighisoara, petite ville au fin fond de la Transylvanie ? » Fleuve éditions ne donne évidemment pas la réponse dans sa présentation de ce « best-seller » publié le 8 octobre.

Les crimes se suivent et ne se ressemblent pas : L’Étrange cas Barbora Š. en est l’illustration, et cela littéralement puisque ce roman graphique des auteurs et illustrateur Vojtěch Mašek, Marek Pokorný et Marek Šindelka, traduit du tchèque par Benoit Meunier, prend pour point de départ un « incroyable scandale qui a ébranlé la République tchèque ». Denoël Graphic promet « un suspense haletant, une plongée à la Millenium dans les gouffres de la pathologie politico-criminelle et du voyeurisme médiatique… » (parution le 14 octobre).

Le lien que je vais faire maintenant est assez ténu, mais je me lance : c’est celui de l’image. Dans Kaliningrad. La petite Russie d’Europe, les photographes Dominique de Rivaz et Dmitri Leltschuk découvrent ou redécouvrent cette « capitale disparue de la Prusse-Orientale » aujourd’hui « tiraillée entre le passé et le présent, marquée par l’architecture gothique et la démesure soviétique ». L’ouvrage, publié par les Éditions Noir sur Blanc le 5 novembre, contient également des textes du journaliste Maik Brandenburg, de l’écrivain et voyageur Cédric Gras, et de Dominique de Rivaz.

Je ne vais pas tenter de faire de lien avec le dernier titre, si ce n’est que celui-ci m’intéresse aussi beaucoup, car il est rare de pouvoir lire en traduction des textes classiques du XIXe siècle. Sous le titre Au puits. Ginkgo-Editeur publie en effet cinq nouvelles de l’écrivain serbe Laza Lazarević (1851 – 1891), « un des auteurs les plus chers aux cœurs des Serbes, qui fit découvrir à l’Occident ce pays mystérieux, depuis peu délivré du joug ottoman ». Nouvelle traduction par Alain Cappon (une première traduction, par Milan Vlad. Georgevitch, date de 1893) et parution en ce début de mois. Une chronique à retrouver sur ce lien.