4/11 : Ça s’est passé un 1er mai – 11 livres de la « nouvelle Europe »

Parler de la littérature de ces trente dernières années, pour marquer le 20e anniversaire de l’élargissement de 2004 (en y ajoutant ceux de 2007 et 2013) : c’est – comme je l’avais expliqué ici le jour même de ce 20e anniversaire – l’objectif de ce billet.

J’y propose chaque jour, un pays et un livre avec pour ligne directrice : un livre qui laisse de côté l’Histoire du XXe siècle pour se concentrer sur le monde contemporain.

Commentaires et suggestions sont les bienvenus !


4/11: MAGYARORSZÁG

Le roman se déroule dans une Hongrie où les abattoirs sont déjà aux normes européennes, mais il pourrait se dérouler dans n’importe quel pays où il y a de la drogue, des voitures de sport, des filles, et des ados en quête de sensations. Percutant de bout en bout, traversé par la violence mais porté par une langue – et une traduction – travaillée jusqu’à la rendre d’une grande fluidité, le titre d’aujourd’hui est :

Comme des rats morts, de Benedek Totth. Billet en cours de préparation !

« Portrait désespérant de justesse d’une certaine adolescence contemporaine, Comme des rats morts est un roman noir sombre et brillantissime. Une sorte de Trainspotting à la piscine. Un choc. » (source)

Titre original : Holtverseny (2014). Une traduction du hongrois par Natalia Zaremba-Huzsvai et Charles Zaremba, publiée chez Actes Sud en 2017.


3/11: ČESKO

Les deux titres entre lesquels j’hésitais pour aujourd’hui ont pour point commun le regard qu’ils portent sur un monde qui va bien au-delà des frontières de la Tchéquie. Celui que j’ai finalement choisi porte une histoire terriblement universelle et terriblement humaine – celle de l’impact de la migration sur le corps et sur l’esprit, mais il est aussi le reflet d’un pays confronté à un phénomène migratoire qui lui avait auparavant été étranger.

Il s’agit de : La fatigue du matériau, de Marek Šindelka, et j’en avais parlé dans ce billet.

« La fatigue du matériau est une tentative pour imaginer une voix à ceux qui n’en ont pas en littérature, ou du moins pas encore : celle de migrants prêts à tout pour quitter leurs communautés détruites, et rejoindre un endroit où ils pensent pouvoir construire un avenir. »

Titre original : Únava Materiálu (2016). Une traduction du tchèque par Christine Laferrière, publiée par les éditions des Syrtes en 2021.


2/11: SLOVENSKO

Cette liste de titres en lien avec le 20e anniversaire de l’élargissement me trottait déjà dans la tête au moment des élections parlementaires de l’automne de l’année dernière. A la consternation de beaucoup, c’est le populiste et pro-russe Robert Fico qui s’est une nouvelle fois retrouvé à diriger le gouvernement. De la Slovaquie de Fico à celle que dépeint l’écrivain (d’abord journaliste) Arpád Soltész, il n’y avait qu’un pas que j’ai franchi allégrement en choisissant un titre pour ce pays.

Il s’agit de : Le bal des porcs, d’Arpad Soltész et j’en avais parlé dans ce billet.

« Le bal des porcs commence comme un roman, et se termine comme un réquisitoire, noir et amer, contre une corruption qui ronge en profondeur « une région qui pourrait bien être la Slovaquie mais qui ne l’est pas vraiment. »

Titre original : Sviňa (2018). Une traduction du slovaque par Barbora Faure, publiée par Agullo en 2020.


1/11: POLSKA

Pour commencer cette série, direction la Pologne, avec un roman écrit à 150 à l’heure et publié juste avant l’adhésion de la Pologne à l’UE (cette UE qui y fait d’ailleurs une petite apparition) : dans une banlieue d’une ville du littoral baltique, il nous plonge dans l’univers de « Le Fort » et ses amis, jeunes désœuvrés et accros, entre rêves et psychoses.

C’est : Polococktail Party, de Dorota Masłowska et j’en avais parlé dans ce billet.

« Hormis la curiosité de savoir ce qu’il va se passer jusqu’à la fin du livre, et où cette histoire de guerre masquée contre les Russes et leur contrebande va nous mener, c’est la langue du roman qui m’a donné envie de le lire jusqu’au bout : une langue hachée, avec un vocabulaire assez répétitif même lorsqu’il s’agit d’explétifs, mais qui forme au bout du compte le portrait d’un jeune homme qui n’a pas grand-chose à quoi arrimer sa vie. »

Titre original : Wojna polsko ruska pod flagą biało-czerwona (2002). Une traduction du polonais par Zofia Bobowicz, publiée par les éditions Noir sur Blanc en 2004.


3/11 : Ça s’est passé un 1er mai – 11 livres de la « nouvelle Europe »

Parler de la littérature de ces trente dernières années, pour marquer le 20e anniversaire de l’élargissement de 2004 (en y ajoutant ceux de 2007 et 2013) : c’est – comme je l’avais expliqué ici le jour même de ce 20e anniversaire – l’objectif de ce billet.

J’y propose chaque jour, un pays et un livre avec pour ligne directrice : un livre qui laisse de côté l’Histoire du XXe siècle pour se concentrer sur le monde contemporain.

Commentaires et suggestions sont les bienvenus !


3/11: ČESKO

Les deux titres entre lesquels j’hésitais pour aujourd’hui ont pour point commun le regard qu’ils portent sur un monde qui va bien au-delà des frontières de la Tchéquie. Celui que j’ai finalement choisi porte une histoire terriblement universelle et terriblement humaine – celle de l’impact de la migration sur le corps et sur l’esprit, mais il est aussi le reflet d’un pays confronté à un phénomène migratoire qui lui avait auparavant été étranger.

Il s’agit de : La fatigue du matériau, de Marek Šindelka, et j’en avais parlé dans ce billet.

« La fatigue du matériau est une tentative pour imaginer une voix à ceux qui n’en ont pas en littérature, ou du moins pas encore : celle de migrants prêts à tout pour quitter leurs communautés détruites, et rejoindre un endroit où ils pensent pouvoir construire un avenir. »

Titre original : Únava Materiálu (2016). Une traduction du tchèque par Christine Laferrière, publiée par les éditions des Syrtes en 2021.


2/11: SLOVENSKO

Cette liste de titres en lien avec le 20e anniversaire de l’élargissement me trottait déjà dans la tête au moment des élections parlementaires de l’automne de l’année dernière. A la consternation de beaucoup, c’est le populiste et pro-russe Robert Fico qui s’est une nouvelle fois retrouvé à diriger le gouvernement. De la Slovaquie de Fico à celle que dépeint l’écrivain (d’abord journaliste) Arpád Soltész, il n’y avait qu’un pas que j’ai franchi allégrement en choisissant un titre pour ce pays.

Il s’agit de : Le bal des porcs, d’Arpad Soltész et j’en avais parlé dans ce billet.

« Le bal des porcs commence comme un roman, et se termine comme un réquisitoire, noir et amer, contre une corruption qui ronge en profondeur « une région qui pourrait bien être la Slovaquie mais qui ne l’est pas vraiment. »

Titre original : Sviňa (2018). Une traduction du slovaque par Barbora Faure, publiée par Agullo en 2020.


1/11: POLSKA

Pour commencer cette série, direction la Pologne, avec un roman écrit à 150 à l’heure et publié juste avant l’adhésion de la Pologne à l’UE (cette UE qui y fait d’ailleurs une petite apparition) : dans une banlieue d’une ville du littoral baltique, il nous plonge dans l’univers de « Le Fort » et ses amis, jeunes désœuvrés et accros, entre rêves et psychoses.

C’est : Polococktail Party, de Dorota Masłowska et j’en avais parlé dans ce billet.

« Hormis la curiosité de savoir ce qu’il va se passer jusqu’à la fin du livre, et où cette histoire de guerre masquée contre les Russes et leur contrebande va nous mener, c’est la langue du roman qui m’a donné envie de le lire jusqu’au bout : une langue hachée, avec un vocabulaire assez répétitif même lorsqu’il s’agit d’explétifs, mais qui forme au bout du compte le portrait d’un jeune homme qui n’a pas grand-chose à quoi arrimer sa vie. »

Titre original : Wojna polsko ruska pod flagą biało-czerwona (2002). Une traduction du polonais par Zofia Bobowicz, publiée par les éditions Noir sur Blanc en 2004.


2/11 : Ça s’est passé un 1er mai – 11 livres de la « nouvelle Europe »

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Arpád Soltész – Le bal des porcs

Le bal des porcs commence comme un roman, et se termine comme un réquisitoire, noir et amer, contre une corruption qui ronge en profondeur « une région qui pourrait bien être la Slovaquie mais qui ne l’est pas vraiment. » Cette im-précision géographique est l’une des premières phrases du roman, et l’une des toutes dernières. On peut facilement passer outre cet avertissement et se dire que c’est bien de la Slovaquie des trente – et surtout des trois – dernières années qu’il s’agit.

Corruption, mafia, connivences malsaines entre politique, médias et forces armées, jeux de pouvoir dans un univers presqu’exclusivement masculin et facilité par la drogue et le sexe : Soltész reprend les éléments d’un monde qu’il avait déjà décrit dans Il était une fois dans l’Est (Agullo, 2019 ; Points, 2020). Mais ses personnages sont différents, encore plus cyniques, et le propos entier doté d’un sentiment d’urgence et d’amertume encore plus immédiat que dans son premier roman. Lire la suite »


Árpád Soltész – Il était une fois dans l’Est

Quand j’ai terminé ma lecture de la quatrième de couverture d’Il était une fois dans l’Est, des mots se sont assemblés dans mon cerveau et ont formé la pensée suivante : je me demande comment ça se termine, mais sûrement pas par un happy end. Il suffit pourtant de lire le roman pour se rendre compte que « happy », ici, est une notion toute relative.

C’est en fait par la fin que le livre commence, avec ses trois pages d’ouverture qui nous font assister en direct à l’explosion du juge Kešela, victime d’une bombe alors qu’assis dans les toilettes il lisait le quotidien local. Cette scène, chapeautée d’un « Dans l’Est, à présent », est suivie d’un fast backward qui nous projette « Dans l’Est, autrefois », c’est-à-dire une quinzaine d’années auparavant. C’est là, au grand carrefour devant l’hypermarché d’un coin paumé de l’Est de la Slovaquie, que débute l’action, lorsque Veronika, auto-stoppeuse qui fait plus que ses 17 ans, monte dans la voiture de Ďod’o dit Mammouth, et de Vasil’ le Russe aux yeux globuleux. C’est quelques kilomètres plus loin, dans l’appartement de banlieue où Veronika, violée, doit être vendue comme chair à prostitution à un gang kosovar, qu’un petit grain de sable vient s’insérer dans la mécanique prévue par Mammouth et le Russe : Veronika s’enfuit. Lire la suite »


Quelques idées pour refaire le plein de livres en septembre

Il semblerait que le phénomène de la rentrée littéraire touche aussi un peu la littérature d’Europe centrale et orientale en français ! Voici quelques uns des titres qui vont sortir au fil du mois. J’en oublie certainement, il suffit de me les signaler dans les commentaires pour que je les rajoute à la liste.

Commençons par la Hongrie : le 4 septembre, Cambourakis publie Le dernier loup de László Krasznahorkai (traduction par Joëlle Dufeuilly), « réflexion subtile sur les liens entre l’homme et la nature, opérant dans le même temps une véritable entreprise d’envoûtement du lecteur qui se retrouve happé par ce récit, ne pouvant s’en extraire qu’au point final ». Le 12 septembre, chez Albin Michel, publication du premier volume du Journal de Sándor Márai (traduction par Catherine Fay) qui, couvrant Les années hongroises 1943-1948, « met en lumière des passages plus personnels de l’œuvre littéraire où se déploient la causticité et la clairvoyance de Sándor Márai »

Deux titres aussi pour la Pologne : Zygmunt Miłoszewski (géniteur de l’ex-procureur Szacki dont les aventures sont publiées chez Mirobole) publie Te souviendras-tu de demain ?, « son ouvrage le plus personnel, devenu aussitôt la meilleure vente de l’année en Pologne » chez Fleuve Editions le 5 septembre. Même jour, aux Editions Noir sur Blanc, La Fabrique de papier tue-mouches, d’Andrzej Bart, « roman dérangeant, […] interrogation sur la responsabilité historique » avec pour cadre l’Holocauste en Pologne (traduction par Eric Veaux).

Arrivant de Slovaquie via Agullo Editions, Il était une fois dans l’Est, d’Árpád Soltész, « tableau noir et âpre des brutales années 1990 et du capitalisme sauvage qui a suivi la chute du communisme » sortira le 19 septembre (traduction par Barbora Faure).

Une nouvelle publication aussi de Roumanie, Solénoïde, « chef-d’œuvre de Mircea Cărtărescu », « roman monumental où résonnent des échos de Borges, Swift et Kafka », « long journal halluciné d’un homme ayant renoncé à devenir écrivain, mais non à percer le mystère de l’existence », sera publié par les Editions Noir sur Blanc dès le 22 août (traduction par Laure Hinckel).

Alma Editeur publie le 29 août La symphonie du Nouveau Monde, de l’auteure d’origine tchèque installée en France Lenka Horňáková-Civade, portrait de destinées entre la Tchécoslovaquie, Marseille et le Nouveau Monde, dans le « tumulte terrible et merveilleux » de l’année 1938.

Comme d’habitude, un petit retour en arrière pour signaler les nouvelles publications qui m’ont échappé ces derniers mois. En juin, les Editions de l’Arbre Vengeur publiaient Opium de Géza Csath : ces « nouvelles, tantôt oniriques, tantôt réalistes, nous offrent le spectacle d’une folie qui annonce un siècle tout entier placé sous ce signe » (traduit du hongrois par Éva Brabant Gero et Emmanuel Danjoy). Toujours en juin, aux Editions Intervalles, La caverne vide de Dimana Trankova, suivi de trois poèmes inédits de Khristo Botev, dystopie dans une Union européenne en miettes après une Troisième Guerre mondiale, mais aussi « ode à l’espoir, à cette force intérieure qui peut demeurer, envers et contre tout, malgré le contrôle omniprésent et les systèmes nés pour broyer ce qui leur résiste » (traduit du bulgare par Marie Vrinat-Nikolov). Début août, aussi aux Editions Intervalles, un roman d’un auteur né en Albanie, mais dorénavant établi aux Etats-Unis et traduit du grec, Le Pays des pas perdus de Gazmend Kapllani, confrontation entre deux frères que tout oppose, « cristallisant à travers leur confrontation l’histoire chaotique des Balkans et de l’Europe des XXe et XXIe siècles » (traduit du grec par Françoise Bienfait).

Pour terminer, deux volumes de non-fiction : le 4 septembre sortira chez Gaïa Editions une invitation au voyage ou du moins à glisser un nouveau volume aux côtés de ceux de Paolo Rumiz ou de Ryszard Kapuscinski, avec La frontière, récit par l’écrivaine-anthropologue voyageuse norvégienne Erika Fatland de son Voyage autour de la Russie de la Corée du Nord à la Norvège : « quatorze États et plus de vingt mille kilomètres en longeant LA frontière, la plus longue au monde, celle de la Russie avec l’ensemble de ses voisins » (traduction par Alex Fouillet). Et en juillet paraissait aux Editions Non Lieu La Moldavie à la croisée des mondes, ouvrage de Josette Durrieu et Florent Parmentier, une ancienne sénatrice et un universitaire qui « apportent un certain nombre d’informations qui permettront aux lecteurs de se faire une idée des enjeux moldaves, enjeux qui dépassent son cadre national et interroge l’identité européenne » (un complément parfait pour ceux et celles qui auraient envie d’en savoir plus sur ce pays avant ou après avoir lu L’empire de Nistor Polobok).