27 janvier – 3 février: lectures communes autour de l’Holocauste

Ce n’est que depuis 2005, soixante ans après la libération du camp d’Auschwitz, que le 27 janvier est la journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste. En commémorant la libération d’un camp, cette journée mémorielle met l’accent sur l’aspect le plus horrifiant de toute la politique nazie de destruction programmée des Juifs d’Europe : le réseau de camps de concentration et d’extermination qui a recouvert l’Europe durant la Seconde Guerre mondiale.

Du Grand Voyage de Jorge Semprún au Si c’est un homme de Primo Levi, les camps sont aussi au cœur de la « littérature de l’Holocauste ». Cependant l’Holocauste, et sa traduction en littérature, évoque une tragédie qui dépasse les frontières des camps : la vie interrompue ou terminée net de communautés juives européennes d’avant-guerre, les ghettos, la vie dans la clandestinité, les exécutions sommaires de masse (« Shoah par balles »), puis la vie d’après-guerre avec le souvenir des six millions de Juifs disparus, celui des survivants, la reconnaissance tardive du génocide dans la sphère publique et la prise de conscience (ou non) de la culpabilité d’individus et de groupes entiers.

Ce sont tous ces aspects de l’Holocauste, et leur présence dans la littérature, que je souhaite explorer le 27 janvier 2021 et dans la semaine qui suivra (27 janvier – 3 février), en mémoire des six millions de Juifs mis à mort par l’Allemagne nazie et ses collaborateurs.

Pour ce faire, je me suis associée avec Patrice, du blog Et si on bouquinait? et je vous propose de partager avec nous une lecture ayant trait à l’Holocauste : témoignage, roman, poème, pièce de théâtre… qu’ils soit liés à l’expérience juive de la Seconde Guerre mondiale ou à celle de ses autres victimes tziganes, handicapés, opposants politiques, homosexuels ou prisonniers de guerre.

Pour participer, il suffit de partager votre lecture sur votre blog, ou sur les réseaux sociaux, du 27 janvier au 3 février, et de nous le signaler par mail ou dans les commentaires sous cet article, pour qu’on puisse l’intégrer dans la liste de vos lectures que nous publierons après le 3 février.

Nous vous proposons quelques pistes de lecture ci-dessous – pour ma part, je présenterai comme toujours des livres d’auteurs d’Europe centrale, de l’Est et des Balkans.

  • Etty Hillesum, Une vie bouleversée (traduit du néerlandais par Philippe Noble ; Points, 2020). Journal intime rédigée par une jeune femme juive internée dans un camp de transit aux Pays-Bas puis à Auschwitz où elle périra fin 1943.
  • Robert Merle, La mort est mon métier (Folio, 1978). Ce livre correspond aux pseudo-mémoires de Rudolf Höss, commandant du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz pendant la Seconde Guerre mondiale.
  • Marceline Loridan-Ivens, Et tu n’es pas revenu (Le livre de poche, 2016). Arrêtée et déportée à Birkenau en 1944, l’auteure parvient à survivre tandis que son père mourra à Auschwitz. Soixante-dix ans plus, elle lui adresse une lettre dans laquelle elle lui raconte sa captivité, son retour, sa vie après les camps.
  • Jurek Becker, Jakob le menteur (traduit de l’allemand par Claude Sebisch ; Grasset, 1997). Dans un ghetto juif en Pologne, un cafetier, Jakob Heim, fait preuve d’inventivité et raconte des nouvelles rassurantes sur l’avancée des Alliés, afin de rassurer ses compagnons d’infortune.
  • Père Patrick Desbois, La Shoah par balles (Plon, 2019). Prêtre catholique s’étant rendu célèbre par ses recherches sur la shoah, et notamment les Einsatzgruppen sur le front Est, il relate ici ce qu’on a appelé la Shoah par balles, en s’attardant sur le « rôle joué par les populations locales, par les voisins et les militants qui permirent le fonctionnement de la machine à tuer des nazis ».
  • Annette Wieviorka, Auschwitz expliqué à ma fille (Seuil ; 1999). Sur cette immense question de la Shoah, sur l’énigme du mal absolu, une historienne reconnue répond aux questions, très directes, de sa propre fille.
  • Andrzej Umanski, La Shoah à l’Est : regards d’Allemands (Fayard Histoire ; 2017). L’auteur, historien originaire d’une famille juive ukrainienne, a réuni les lettres, journaux intimes, dépositions des acteurs mais également des spectateurs des exécutions qui se sont déroulées sur le Front Est.
  • Hannah Arendt, Eichmann à Jérusalem – un essai sur la banalité du mal (traduit de l’allemand par Anne Guérin ; Folio Histoire, 2006). Compte-rendu du procès d’Adolf Eichmann, montrant son rôle dans l’extermination des juifs, auquel s’ajoutent des réflexions politiques et philosophiques.
  • Beate & Serge Klarsfeld, Mémoires (Livre de poche, 2016). Retour sur une vie consacrée au combat pour la mémoire des victimes de la Shoah et à la chasse incessante d’anciens nazis.
  • Imre Kertész, Être sans destin (traduit du hongrois par Charles et Natalia Zaremba ; Actes Sud, 1998) : avec ce livre composé à Budapest dans la solitude des années d’après-guerre, l’auteur – prix Nobel de littérature en 2002 – cherche la voix nécessaire pour reconstituer son expérience des camps.
  • Arnošt Lustig, Elle avait les yeux verts (traduit du tchèque par Erika Abrams ; Galaade, 2010) : né à Prague en 1926 et rescapé des camps, l’auteur écrit ici l’histoire de l’adolescente Hanka, et des choix qu’elle doit faire pour survivre à l’enfer d’Auschwitz.
  • Clara Kramer avec Stephen Glantz, La guerre selon Clara (traduit de l’anglais par Isabelle Taudière ; Calmann-Lévy, 2009) : Zolkiew, petite ville polonaise, est envahie par les nazis à l’été 1941. Durant deux ans, Clara (douze ans), se cache avec dix-sept autres personnes sous une maison afin de survivre.
  • Hanna Krasnapiorska, Lettres de ma mémoire (traduit du biélorussien par Alena Lapatniova ; Ver à Soie, 2020) : née en 1925, l’auteure témoigne dans ce livre publié pour la première fois en 1984, des conditions de vie dans le ghetto juif de Minsk, dont elle est l’une des rares survivantes.
  • Piotr Rawicz, Le sang du ciel (en français ; Gallimard, 2014) : l’auteur, né en Galicie, survivant d’Auschwitz et installé en France après la guerre, prend dès 1961 le parti de la fiction pour évoquer la fuite d’un homme face à la persécution nazie.
  • Aharon Appelfeld, Les Partisans (traduit de l’hébreu par Valérie Zenatti ; Editions de l’Olivier, 2015) : né en Bucovine (alors en Roumanie), l’auteur a tout juste dix ans lorsqu’il s’évade d’un camp. Ce roman, qui se déroule dans une forêt d’Ukraine, raconte les derniers mois de guerre d’un groupe de partisans juifs luttant pour survivre et pour sauver des Juifs.
  • Zofia Nałkowska, Médaillons (traduit du polonais par Agnieszka Grudzinska ; Editions Pétra, 2018) : entre fiction et document, ces textes publiés dès 1946 sont ceux d’une écrivaine renommée en Pologne, à partir de sa participation à la Commission d’enquête sur les crimes allemands en Pologne.
  • David Albahari, Goetz et Meyer (traduit du serbe par Gojko Lukić et Gabriel Iaculli ; Gallimard, 2002) : dans ce beau roman postmoderne, un narrateur sans nom cherche à retracer l’histoire de sa famille disparue dans le camp de Sajmište, près de Belgrade.