La reprise

Cinq mois aujourd’hui depuis ma dernière chronique active sur ce blog ! C’était avec Récits ultimes, d’Olga Tokarczuk, et depuis se sont succédé les articles préprogrammés : cinq autour de la littérature de Taïwan (épisodes trois, quatre, cinq, six et sept (parce que)), et une comparaison périlleuse entre Marcel Aymé et Kálmán Mikszáth (périlleuse surtout parce qu’associer un écrivain français oublié et un écrivain hongrois très classique chez lui mais à peine traduit en français, ça n’allait évidemment pas attirer les foules).

En attendant, il s’est aussi passé que :

Des traductions ont été publiées.

Pour faire très bref, je noterai :

Celle, par Joëlle Dufeuilly (et donc du hongrois), du dernier roman de László Krasznahorkai, Le baron Wenckheim est de retour, chez Cambourakis. Pour ce roman, que son auteur présentait à la fois comme son dernier (ce, avant de publier Herscht 07769) et comme la fermeture de la boucle ouverte avec Tango de Satan, l’éditeur parle d’ « un László Krasznahorkai virtuose, qui enchâsse brillamment [les discours et interventions des uns et des autres], tout en multipliant ellipses et coq-à-l’âne inattendus », et qui « interroge le rapport de chacun à l’autre, à l’étranger et plus généralement à l’au-delà des frontières ».


Celle, par Eurydice Antolin (et donc du tchèque), du premier roman de Kateřina Tučková à paraître en français, Les dernières déesses. J’étais vraiment contente d’apprendre que cette autrice tchèque contemporaine allait enfin être accessible aux lecteurs – et surtout lectrices, probablement – francophones, car après avoir lu « L’expulsion de Gerta Schnirch » (dans sa traduction hongroise, faute de mieux) et après l’avoir interviewée dans la foulée, j’étais curieuse de voir où allait la mener son intérêt pour l’histoire et les habitant.e.s de sa région. « Entrelaçant magnifiquement histoire, folklore et fiction, [Les dernières déesses est] un roman qui met en lumière un pan méconnu de l’histoire des Carpates blanches et le destin hors du commun des déesses qui ont arpenté ces terres », dit l’éditeur dans sa présentation du livre.


Celle, par Marie Vrinat-Nikolov (et donc du bulgare) des Récits de Tcherkaski, de Yordan Raditchkov, chez Ginkgo. Il s’agit d’une traduction retravaillée d’un texte d’abord paru en français il y a déjà presque trente ans (1994, L’esprit des péninsules). Très attendus (par moi en tout cas), ces Récits de Tcherkaski, pour le texte en lui-même et pour continuer mon exploration de la littérature bulgare. Un extrait de la présentation de l’éditeur : « Sous la plume de Yordan Raditchkov, conteur des temps modernes, le folklore des Balkans et les superstitions paysannes se fondent, au-delà de la croyance naïve en la présence du merveilleux dans le quotidien, en une vision malicieuse et poétique du monde. »


Celle, par Gérard Conio (et donc du polonais) de La jolie Madame Seidenman, d’Andrzej Szczypiorski, aux éditions Noir sur Blanc. Il s’agit là aussi d’une réédition, d’un roman d’abord paru aux éditions L’Age d’homme mais dont j’avais chroniqué l’édition suivante, celle de Liana Levi en 2004. L’édition présente a le double avantage de comporter une postface inédite du traducteur et une préface, également inédite en français, de Chimamanda Ngozi Adichie. Et si, en plus de ma propre chronique, il fallait pour vous convaincre une citation de la présentation de l’éditeur, la voici : « Un magnifique roman intemporel, sur les disparus et les survivants, le portrait d’un pays sous occupation, d’une société aux nuances subtiles, où la frontière est ténue entre « les bons » et « les méchants », entre « la justice » et « l’iniquité ». »


Celle, par Florica Courriol (et donc du roumain) d’Une forme de vie inconnue, d’Andreea Răsuceanu pour Le nouvel Attila. Sa traductrice me l’avait rapidement décrite comme étant quelque part « entre Hortensia Papadat-Bengescu et Gabriela Adamesteanu », ce qui me l’a tout de suite rendue sympathique, ce à quoi s’ajoute l’implantation bucarestoise du roman. Quelques mots supplémentaires de l’éditeur : « Dialogue entre trois femmes hantées par l’absence d’un proche, convaincues qu’on peut forger son propre bonheur, Une forme de vie inconnue est un texte émouvant et entêtant, qui happe le lecteur grâce à son pouvoir d’évocation, même au plus fort de l’Histoire ».


Celle, enfin, par Clara Royer (et donc du hongrois) de L’été où mon père est mort, de Yudit Kiss, aux éditions de l’Antilope. Ayant tout juste terminé de lire Mourir en été, de l’écrivaine allemande d’origine hongroise Zsuzsa Bánk, je ne peux qu’être interpellée par ce titre de Yudit Kiss qui évoque, lui aussi, la mort d’un père et, par-delà, le rapport individuel et familial à l’histoire hongroise du XXe siècle car, écrit l’éditeur, « À travers l’histoire de son père, Yudit Kiss met en évidence une identité juive bien différente de celle d’Europe occidentale : celle des populations juives des pays de l’ex-bloc communiste, plus précisément ici de la Hongrie. »


Il s’est aussi passé, pêlemêle, que :

  • Le prix Laure Bataillon de la meilleure œuvre traduite en français dans l’année a été décerné à Joëlle Dufeuilly pour sa traduction de Le baron Wenckheim est de retour, de László Krasznahorkai. L’International Booker Prize 2023 a été décerné à Georgi Gospodinov pour son roman Time Shelter et à sa traductrice anglaise Angela Rodel ; en français, le roman a été publié en octobre 2021 dans la traduction de Marie Vrinat-Nikolov sous le titre Le pays du passé.
  • Milan Kundera est décédé, de même que, avant lui, Dubravka Ugrešić et, après lui, David Albahari ; du premier, j’ai encore trop peu lu sur le blog pour proposer un titre ou une analyse plus intéressants que ceux qu’on cite habituellement en lien avec l’énigmatique écrivain ; de la seconde, je suis à très petits pas les efforts des éditions Christian Bourgois pour (ré)editer son œuvre et propose donc d’abord ma lecture du Musée des redditions sans condition, avant de publier celle de La renarde ; du troisième, je ne peux que recommander la lecture de l’excellent Goetz et Meyer.
  • Pour célébrer le centenaire de la poétesse polonaise Wisława Szymborska (décédée en 2012), Lego a décidé de récréer, à l’aide de 21 000 blocs, la salle du Konzerthuset Stockholm au moment où le prix Nobel de littérature lui a été remis en 1996.
Source, et d’autres images

J’ai lu trois livres que j’ai aimés

pour leur ampleur, leur cadre, leur écriture, leur histoire, leurs personnages, leur vision du monde :

J’ai raté un certain nombre de lectures communes,

y compris certaines dont j’étais co-organisatrice voire même initiatrice, ce pour quoi je dois un grand mea culpa à toutes les personnes qui ont lu Slobodan Šnajder, Sándor Márai, Ferenc Karinthy et Svetlana Alexievitch en s’attendant – en vain – à pouvoir comparer leur opinion et la mienne.

Et c’est justement avec un article, autour de deux titres que je prévoyais pour une lecture commune, que je reprends la voie du blog.

(Cet article est préprogrammé, de même que le suivant, et celui d’après, mais n’hésitez pas à laisser un (des) commentaire(s), j’y répondrai (bientôt)).


13 commentaires on “La reprise”

  1. Athalie dit :

    Bonne reprise ! J’espère que commenteras Confitéor, un sacré roman que je garde encore en mémoire.

  2. keisha41 dit :

    Youpee pour les nouvelles. Tiens, je n’ai pas lu Le tango de Satan, et un autre parait, de cet auteur complètement dans mes cordes! Je guette à la bibli…
    Quant aux récits de Tcherkaski, hé oui, c’est une pépite , mon billet (merci Ginkgo)
    https://enlisantenvoyageant.blogspot.com/2023/08/les-recits-de-tcherkaski.html

  3. Nathalie dit :

    Ah ah ce retour discret, en plein mois d’août, genre « ils sont tous en vacances, ils ne vont rien remarquer »…
    Blague à part, j’ai acheté le roman de Krasznahorkai, mais je ne l’ai pas encore lu. J’ai publié un billet il y a quelques semaines sur Que ma joie demeure mais peut-être pas aussi enthousiaste que ton avis. Et Confiteor, ah c’est tout un monde !
    Bon retour parmi nous !

    • Vraiment, on ne peut rien te cacher.
      Pour Giono, je suis allée te lire et je suis d’accord qu’avec un peu plus d’esprit critique de ma part j’aurais pu être agacée par certains aspects du roman, j’aurais pu m’attarder sur les idées de Bobi, etc, mais la langue est tellement belle. Et, dans un registre différent même si lui aussi un peu volumineux, j’ai beaucoup aimé Confiteor et trouverai bien l’occasion de lire d’autres romans de Cabré.

  4. Vincent dit :

    Content de vous relire sur ces littératures. László Krasznahorkai et Yordan Raditchkov sont au programme.

  5. Ingannmic dit :

    Eh bien bonne reprise !! J’ignorais le décès de David Kalahari (certes bien moins célèbre que Kundera…) dont le Goetz et Meyer, lu en début d’année dans le cadres des lectures de l’Holocauste, m’a en effet fortement marquée.

  6. […] faisant pas un suivi très assidu, j’ai fait sept billets sur les nouvelles parutions (1, 2, 3, 4, 5, 6, et 7) ; sur les 58 titres recensés, je n’en ai lu que 10 et chroniqué que deux (Les […]


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